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Le Soleil et les Grenouilles

 

 

Aux noces d'un Tyran tout le Peuple en liesse

Noyait son souci dans les pots.

Esope seul trouvait que les gens étaient sots

De témoigner tant d'allégresse.

Le Soleil, disait-il, eut dessein autrefois

De songer à l'Hyménée.

Aussitôt on ouït d'une commune voix

Se plaindre de leur destinée

Les Citoyennes des Etangs.

Que ferons-nous, s'il lui vient des enfants ?

Dirent-elles au Sort, un seul Soleil à peine

Se peut souffrir. Une demi-douzaine

Mettra la Mer à sec et tous ses habitants.

Adieu joncs et marais : notre race est détruite.

Bientôt on la verra réduite

A l'eau du Styx. Pour un pauvre Animal,

Grenouilles, à mon sens, ne raisonnaient pas mal. 

— Jean de La Fontaine —

Recueil I - Livre 6 - Fable 12

Les fables de Jean de La Fontaine