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La Fortune et le jeune Enfant

   

 Sur les bord d’un puits très profond,

Dormait étendu de son long

Un Enfant alors dans ses classes.

Tout est aux Écoliers couchette et matelas.

Un honnête homme en pareil cas

Aurait fait un saut de vingt brasses.

Près de là tout heureusement

La Fortune passa, l’éveilla doucement,

Lui disant : Mon mignon, je vous sauve la vie.

Soyez une autre fois plus sage, je vous prie.

Si vous fussiez tombé, l’on s’en fût pris à moi ;

Cependant c’était votre faute.

Je vous demande en bonne foi

Si cette imprudence si haute

Provient de mon caprice. Elle part à ces mots.

Pour moi, j’approuve son propos.

Il n’arrive rien dans le monde

Qu’il ne faille qu’elle en réponde.

Nous la faisons de tous échos.

Elle est prise à garant de toutes aventures.

Est-ce sot, étourdi, prend-on mal ses mesures ;

On pense en être quitte en accusant son sort.

Bref la Fortune a toujours tort.

 

 

— Jean de La Fontaine —

Recueil I - Livre 5 - Fable 11

Les fables de Jean de La Fontaine